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Jean-Paul
Deremble
Critique
d’Art
Université
de Lille
« Ciels et soins palliatifs »
Exposition de Sophie Pénicaud
Paris La Défense.
Maison d’Église, Notre
Dame de la Pentecôte.
31 janvier – 8 mars 2024
L’art
véritable s’enracine profondément dans l’expérience humaine jusque dans ses
expressions les plus tragiques. On pourrait penser que la recherche de la
beauté est un moyen d’échapper aux noirceurs de la vie. Certes l’art est une
quête de lumière mais jamais indifférente à nos ténèbres.
Les œuvres de Sophie Pénicaud sont une manifestation
remarquable du paradoxe de l’art, entièrement marqué par la gravité
existentielle et totalement porteur d’une vision transcendantale. En associant
le ciel et les soins palliatifs, l’exposition provoque. Elle nous invite à voir
le ciel dans l’un des moments les plus sensibles de notre existence, la fin de
vie précisément, et à découvrir dans l’épreuve douloureuse de la séparation une
présence lumineuse. Sur la terre comme au ciel disent les chrétiens en parlant
de Dieu, un défi et un acte de foi.
Il faut beaucoup d’art pour ouvrir l’opacité
de la mort à la lumière. C’est ce dont nous avons le plus besoin pour ne pas
sombrer dans la désespérance, C’est aussi ce qu’il y a de plus difficile si on
ne veut pas planer dans l’artificialité. Sophie Pénicaud accompagne sa maman,
avec toute une équipe de soignants convaincus de la nécessité humaine de
rassembler notre humanité autour de l’être qui meurt. Elle est là, jour après
jour, prodiguant les gestes d’affection, elle écoute les dernières paroles, et
voilà qu’elle reçoit un message inouï : la fin de la vie est un passage,
une ouverture. Sa maman parle de paradis.
L’artiste s’éveille alors et peint une
pléiade de ciels avec des nuages blanchis par une luminosité irrésistible. Les
formes dansent selon les caprices enchanteurs des zéphyrs azuréens, les nuances
infinies de bleu nous enveloppent selon des douceurs maternelles inédites.
Sur terre le soleil se couche, la mère
meurt, au ciel une lumière transfigurante se lève. C’est un seul et même temps
de la vie qui se donne à la mort et de la mort qui enfante une vie nouvelle.
Comment comprendre cela ? comment l’exprimer ? Nous n’avons que la
coordination paradoxale des contraires pour jeter en avant de nous une alliance
plus subtile.
En contemplant les ciels de Sophie
Pénicaud, la vie mortelle d’ici-bas gagne en altitude, en légèreté... sans
cesser d’être mortelle. Les très fines colorations irisées, l’épaisseur des
nuages immatériels, les rendus d’horizons devenus familiers témoignent de
l’Esprit de la chair. La réalité terrestre est métaphorisée, mais
paradoxalement la beauté ici ne vaut que par la pesanteur humaine tout entière
présente dans les transparences gracieuses de la peinture.
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Dans "Valenciennes-infos " Article Exposition Château Aubry du Hainaut
"Dimanche après-midi, dans le cadre des Journées du Patrimoine, l’Hostellerie d’Aubry-du-Hainaut ouvrira gratuitement les portes de son château du 16ème siècle au public. En marge des visites guidées organisées par le propriétaire des lieux, Jean-Pierre Coquerelle, les promeneurs pourront découvrir les oeuvres picturales de Sophie Pénicaud, une exposition intitulée « Du Nord au Sud ».
Chaque année, désormais, le Château d’Aubry-du-Hainaut ouvre ses portes au public dans le cadre des Journées du Patrimoine. Cette année, des visites guidées se succèderont de 14h à 19h, emmenées par des guides bénévoles, des élèves de BTS Tourisme pour l’essentiel (départs toutes les 5/10mn par groupes de 15 personnes). Avec, en point d’orgue de cette journée qui emmènera le visiteur à travers 5 siècles d’histoire locale, un passage par l’exposition de la plasticienne Sophie Pénicaud.
« Chaque année, nous agrémentons nos visites guidées d’une exposition. Nous choisissons toujours des artistes valenciennois... de naissance ou d’adoption », explique le propriétaire de l’Hostellerie d’Aubry-du-Hainaut, Jean-Pierre Coquerelle. (…)Sophie Pénicaud maîtrise avec le même bonheur toutes les techniques et toutes les matières. Selon l’humeur et l’effet désiré, elle s’épanouit le figuratif ou l’abstrait, dans l’aquarelle, l’acrylique, la craie grasse, le collage... Son exposition « Du Nord au Sud », en référence - peut-être - à son départ de Valenciennes vers Dignes-les-Bains, en est la parfaite démonstration. Il se dégage de ses toiles une puissance que l’on ne soupçonnerait pas,
sur d’aussi petits formats.
Une lumière, également, qui semble jaillir du tableau et irradier vers le spectateur : « Je suis très sensible à la lumière. Quand je vivais à Valenciennes, j’ai réalisé énormément de photos qui m’ont permis de capturer les ciels d’ici. J’aime notamment les ciels rougeoyants de novembre », analyse l’artiste. Artiste complète, Sophie Pénicaud a également réalisé de très grands formats, des fresques gigantesques destinées à illuminer différents lieux publics : le mur du métro Duroc à Paris, le mur d’enceinte d’une école, en région parisienne, le mur de la médiathèque des Mureaux, dans les Yvelines, etc.
Sophie Pénicaud fut également « Responsable en coloration extérieure » à Euro Disney, un titre ronflant qui ne devait cependant pas lui permettre de laisser s’exprimer tout son pouvoir créatif ; créatrice de logos et en-tête ; illustratice de livres pour enfants, etc. "...
13 Mars 2016
Un regard sur la peinture de Sophie Pénicaud.
Sophie Pénicaud regarde le près et le lointain.
Le près, elle le dessine avec précision, crayon en main,
avec une fidélité absolue. Rien ne lui échappe ; la croisée de la fenêtre
entr’ouverte, le fauteuil, ce que l’œil voit de là où il regarde. Elle
privilégie des éléments et en fait des natures mortes, toujours agréables à
regarder, empreintes de douceur de vivre. Elle établit le
« portrait » de la maison comme personne, du dehors, comme du dedans.
C’est son grand art. Les intérieurs, l’architecture, les vues du dedans, l’architecture,
les maisons, seront regardées, étudiées, précisées, selon ce que son œil va
percevoir, et que sa main va dessiner, de main de maître.
Sa formation première des Arts Appliqués est la bonne pour
elle; toujours, elle donnera l’équilibre, la perspective juste, les volumes,
quelques détails choisis ...
Le lointain, lorsqu’elle le regarde, va lui donner d’être en
la présence-même de la poésie, par des touches plus floues, car alors, il y a
du recul. En effet, si elle sait voir de très près, elle sait aussi appréhender
le lointain, et, lorsqu’elle traite de paysages, on va voir son graphisme
originel, toujours sous-jacent à son œuvre, créer des interpénétrations très
subtiles et toujours réussies. En regardant ces vastes étendues de nature
presque vierge, on entre en présence d’une profondeur qu’elle a contemplée.
Elle parle, dans ses paysages, et bien au-delà d’eux, de la présence, dans ce
monde créé, de ce qui est présence spirituelle, et qui se donne à voir.
La couleur va rentrer en œuvre dans la douceur. Un jaune est
constant et n’appartient qu’à elle. Il est d’or, et se fait parfois plus acide.
Il sera la note qui caractérise son travail, à l’huile ou à l’acrylique, dans
ses pastels, ses monotypes. Il sera agrémenté de bleus déclinés, de rouges, de
verts, parfois de touches de rose.
Elle a sa palette, son graphisme. Toujours, tels les doigts
des deux mains qui s’enlacent, ses paysages unissent en eux-mêmes l’intime qui
travaille son âme.
Sophie Pénicaud fixe un horizon et questionne la vie. Il y a
une rime entre ses ciels et ses terres ou ses eaux mêlées. Que fixe t-elle dans
cette interface qui nous introduit dans ce fond qui revient toujours vers
nous ?
Sa peinture se donne dans son mystère, emprunt de rigueur et
de poésie, de franchise et de retenue, avec ses particularités, son œuvre capture
le regard et nous entraîne; elle est intemporelle. »
Christine Chelini
Historienne de l’Art
Artiste plasticienne

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Tiré du livre d'or de l'exposition Paris V (1990)
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